samedi 12 décembre 2009

Chambres d'hôtel (20)

Venise, novembre 1983

D'où tenait-elle l'adresse ? Toujours est-il que c'est Françoise R. qui nous fit découvrir la Casa de Stefani au tout début des années 80 et que nous en fîmes notre point de chute vénitien pendant plusieurs années, presque toujours en novembre. Souvenirs de réservations aléatoires, de trains de nuit nous faisant parfois arriver avant que la pension ne soit ouverte et traîner autour du Campo San Barnaba désert à la recherche d'un café où attendre. Et puis l'entrée très sombre et son odeur entêtante de pisse de chat. Et encore l'espace immense du salon du premier étage sur lequel donnaient quelques chambres, sol de marbre, fresques à l'abandon et hauts fauteuils de bois — inconfortables et si travaillés qu'on aurait pu les croire sortis tout droit du chœur d'une église gothique. Et enfin les chambres dont l'exploration successive au fil des ans souligna la grande disparité, de la minuscule 6 (à éviter) à l'imposante 11, soixante mètres carrés au moins, fenêtres donnant sur la ruelle, avec dans un coin une cabine de douche posée comme une verrue, installée sans ménagement aucun pour ce qui restait des fresques au mur.
Lorsque la "Suite Vénitienne" de Sophie Calle sortira en 1982, nous y apprendrons que c'est là que résidait le Henri B. qu'elle cherchait à retrouver, et la raison d'y retourner en sera démultipliée jusqu'à ce que la pension ferme et qu'il faille aller ailleurs. Des années plus tard, je lirai dans "L'Italie Retrouvée" de Jean-Louis Vaudoyer que c'est sur la Casa de Stefani qu'il se rabattra lorsque, revenant à Venise longtemps après ses années de "club des longues moustaches" (avec, entre autres compagnons, Henri de Régnier dont on vient de ré-éditer "L'Altana"), il trouvera fermée la Casa Zuliani qui était auparavant son repaire.
Après bien des années de porte close, la Casa de Stefani s'est transformée en un hôtel plus chic et plus cher, au lobby un peu clinquant. Tout a semble-t-il été refait et, si ses fantômes n'ont pas tout à fait disparu, c'est sans doute plutôt mêlés aux échos des pas sur les pavés de la Calle Lungha San Barnaba qu'il faut espérer maintenant les croiser.

vendredi 11 décembre 2009

Amériques (5)

sur les rives du fleuve Parana, novembre 1997

La route se termine en hésitant, cul-de-sac de terre battue, parking informel où l'on se gare au petit bonheur. Une balustrade de bois, quelques bancs que des générations de promeneurs et d'amoureux ont gravés au couteau, et puis le fleuve de passage, large et lent, que l'on regarde en silence alors que s'étire la fin de l'après-midi.

jeudi 10 décembre 2009

Ils arrivent…

Aussois, décembre 2009

mercredi 9 décembre 2009

Chambres d'hôtel (19)

Chennai, janvier 2002

Le train de nuit en provenance de Bangalore est arrivé à l'heure.
Sortir à cinq heures du matin de la gare de Chennai, c'est débarquer sans préavis dans un monde dont la violence visuelle est renforcée par l'obscurité encore lourde des rues mal éclairées. C'est aborder de front aux rivages d'une réalité qui est loin des chatoiements de la pleine journée qui la rendront plus abstraite et c'est — avançant aux pointillés fluctuants des braseros jalonnant la chaussée — devoir se frayer un chemin au milieu même de ceux qui y vivent et y terminent leur nuit.
L'agitation naissante s'estompe très vite dès que l'on se glisse dans les rues adjacentes, mais il est trop tôt encore pour espérer trouver autre chose que porte close aux quelques petits hôtels qui s'y échelonnent. Poussant plus loin alors que le jour commence à pointer, le Tristar Hotel offre un point de chute moderne et aseptisé où l'on se réfugie sans enthousiasme.
De l'autre côté du boulevard qui se perd dans la brume, des palissades grand format dissimulent l'entrée d'un quartier de planches et de tôles où, n'étant que de passage, l'idée même de photographier me devient totalement étrangère.

mardi 8 décembre 2009

Photos que l'on aurait pu prendre (5)


Le jour où j'ai fait ma première photo, par Jean-Philippe Toussaint (2001)

"Ma première photo, je l'ai faite vers quarante ans — à trente-neuf ans exactement, quelques jours après mon anniversaire de trente-neuf ans. Certes, à vingt ans, j'avais déjà fait quelques photos que je développais dans ma salle de bain. [...] Plus tard, vers trente ans, ce n'est plus que dans mes livres que je fis des photos. Les plus emblématiques sont celles que j'ai faites dans L'Appareil-photo, avec un appareil volé, quelques photos mentales prises en courant dans la nuit dans les escaliers d'un navire, photos uniformément sous-exposées qui, lorsque je les fis développer, ne révélèrent rien d'autre que quelques traces de mon absence." ... lire la suite

lundi 7 décembre 2009

Chambres d'hôtel (18)

Aussois, le 7 décembre 2009

Un mur crépi, un oreiller... ce pourrait être n'importe où.
Les chambres du Centre Paul Langevin ont le confort pragmatique de ces lieux d'accueil de collectivités servant de centres pour colloques en basse saison. Mobilier en pin, placards verts et, au mur, une affiche Samivel un peu passée du Parc Naturel des Ecrins.
Petit-déjeuner à partir de 7h30.
Ne pas oublier de laisser la clef sur le tableau avant le départ (clef perdue : 20 €).

dimanche 6 décembre 2009

Shanghai (2)

Campus de l'East China Normal University,
Shanghai, décembre 2006