samedi 2 novembre 2013

Les rendez-vous manqués

Californie, janvier 2013

On a beau le savoir et se dire qu'on ne se fera plus avoir, c'est la route qui gagne plus souvent qu'à son tour. Sans autre but que toucher à la frontière le lendemain, on a roulé toute la journée au hasard, glissant de petites villes aux banlieues proprettes à des lieux-dits qui ne sont guère que des noms sur la carte. Un croisement, un General Store, une pompe à essence et, de temps en temps, un motel dont, jaugeant d'un coup d'œil les places de parkings presque uniformément désertes devant l'alignement en "I", en "L" ou en "U" des chambres, on se dit à chaque fois que l'on s'arrêterait bien là, mais il est toujours trop tôt. Alors on avance et, bientôt, c'est le soir qui tombe. Comme par un fait exprès, c'est le paysage qui change lui aussi et abandonne ce qui lui restait de mélange aléatoire et furtif entre nature et traces de vies. De droite qu'elle a longtemps été, la route commence à serpenter en grimpant le long de points de vue dont on ne doute pas qu'ils seraient "scenic" — comme le promet la carte —, ne seraient l'obscurité et la pluie qui se double ponctuellement de poches de brouillard. On s'amuse à penser que les rares pick-ups que l'on croise arborent peut-être, ironiques, un autocollant proclamant fièrement "Sunny California" mais, en même temps, on commence à douter de trouver quelque chose pour la nuit sans, au choix, aller beaucoup plus loin qu'imaginé ou faire demi-tour. D'une intersection sans âme qui vive, on choisit la troisième voie qui nous ramène à une agglomération sans charme. L'hôtel sera "de chaîne", fonctionnel et cher, loin des tentations de l'après-midi. Aurait-on tourné à gauche plutôt qu'à droite, on aurait pourtant trouvé le motel devant lequel on passera le lendemain en faisant le chemin à l'envers, reprenant de jour la route abandonnée au creux de la nuit et remontant l'espace faute de pouvoir rembobiner le temps. Comme la vie qui va.

vendredi 1 novembre 2013

Les pélicans de Malibu


Californie, janvier 2013

Ils sont quelques dizaines à tournoyer inlassablement et, si le ciel en gardait la trace, les trajectoires qu'ils décrivent le couvriraient de larges cercles attachés à la mer par une verticale abrupte, la démultiplication d'une armée, au choix, de lettres phi géantes, de signatures minimalistes ou de graffiti comme on en dessine machinalement lorsqu'on s'ennuie en réunion. Mais, accoudés à la rambarde de la jetée, c'est rarement que l'on parvient à en observer le déroulé complet. On choisit au hasard un point que l'on va suivre du regard pendant de longues minutes et c'est le choc d'un autre sur l'océan que l'on entend, nous faisant, lorsqu'on se détourne pour repérer celui-ci à la tache d'écume qu'il crée quelques instants, quitter des yeux celui-là qui en profite le plus souvent pour se laisser tomber à son tour comme pierre. Onde dans le ciel et particule dans l'eau, il y a comme un principe d'incertitude chez les pélicans de Malibu. On pourrait rester des heures à en observer le manège, se poster comme certains avec trépied et mode rafale pour en saisir l'hypothétique instant décisif, mais Malibu c'est aussi, par l'unique route qui s'en échappe vers le nord, au droit de l'Océan, la porte d'entrée des collines pour un retour haut perché vers Los Angeles. Lacets, raidillons, bifurcations incertaines, on atteint assez vite Mulholland Drive que l'on suit jusqu'au cul-de-sac de son segment privatisé obligeant à faire demi-tour et à chercher un contournement. Le territoire ne ressemble pas vraiment à la carte, effet du relief et de l'enchevêtrement des chemins et impasses se faufilant entre les hauts murs des propriétés sécurisées. On roule au hasard et on se perd, croyant parfois se raccrocher à une intersection qui n'est pas la bonne, et on échoue sur une route de crête comme on sortirait la tête de l'eau. D'un côté l'Océan, de l'autre la vallée de San Fernando, et personne à l'horizon, contraste étrange et presque angoissant avec le fourmillement que l'on sait d'en-bas et que l'on retrouvera dans moins d'une heure. Bientôt la nuit qui tombe, bientôt les phares sur les autoroutes et les néons qui s'allument, Westwood en ligne de mire et fin de nos cercles dans les hauteurs.

mercredi 30 octobre 2013

Glaces et pizza

Venice (Californie), 26 janvier 2013

lundi 28 octobre 2013

Passerelles (72)


Los Angeles (Californie), 2 février 2013