New York (NY), 1993
La "photo dans la photo" avait été prise à quelques pâtés de maison à peine d'où elle était accrochée ce jour-là, poster se fondant dans le décor de briques et de tuyaux d'un bar de New York comme Marlilyn l'avait fait quarante ans ou presque auparavant dans celui de son métro.
De toutes les photos que j'ai pu voir de Marilyn, c'est une de celles que je préfère. Il y en a quelques autres que j'aime aussi particulièrement pour leur côté "sans fard", comme celles prises sur le tournage des Misfits et que je rattache instantanément aux noms d'Inge Morath ou d'Eve Arnold, mais celle-ci m'avait toujours été anonyme. Comme beaucoup j'imagine, je connaissais cependant cette photo depuis longtemps. Pourtant, non seulement je n'aurais rien pu dire de son auteur mais, plus curieusement en fait, je ne m'étais jamais posé la question. Et puis il y a eu — il y a quelques mois —la parution du livre d'Adrien Gombreaud (*), et le nom d'Ed Feingersh est remonté à la lumière.
Je ne saurais dire mieux que ce qui nous est donné à lire sur la quatrième de couverture : "New York, 1955. Marilyn Monroe quitte Hollywood pour échapper à l’emprise des studios et à son image de blonde écervelée. Elle se réinvente en fréquentant l’élite intellectuelle et les cours de l’Actors Studio. Pour témoigner de cette nouvelle Marilyn, un magazine populaire engage le photographe Ed Feingersh. Ensemble, Ed et Marilyn inventent un style de reportage qui emporte le lecteur dans l’intimité de la star. Créatif et téméraire, il la suit pas à pas dans les rues, le métro ou les bars de Manhattan. De son objectif jaillissent les images sensibles d’une femme sans fard, une passante presque ordinaire, heureuse, mélancolique, impériale et solitaire. Cinquante ans plus tard, ces clichés cachent encore une énigme : alors que l’actrice entrait dans la légende, le photographe disparaissait sans laisser de trace. Le temps d’une semaine, il avait su voir Marilyn comme personne avant lui."
Voilà. Chassé-croisé, recto-verso, la réalité n'est pas toujours là où on l'attend. Et au détour d'une ou deux images, le photographe — qui à la fois en est le témoin et la construit — se glisse aussi, fugitif, sur quelques miroirs avant de disparaître.
(*) Une blonde à Manhattan, Le Serpent à Plumes (2011)
http://www.uneblondeamanhattan.com/
En contrepoint, hasard des publications, des humeurs dominicales, quelques livres des Cahiers du Cinéma dont un Cassavetes :
RépondreSupprimerhttp://brunoh-deambulations.blogspot.com/2011/09/intention.html
Deux "monstres sacrés", pour des motifs différents mais pour qu'existe durablement (?) une même mythologie du Cinéma.
La position de cette photo de Marilyn est étrange, comme un accrochage éphémère entre tuyaux et mur de briques. Belle photographie, belle simplicité.