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samedi 20 septembre 2014

Dans la ville grise

Brasov (Roumanie), 1995

vendredi 11 juillet 2014

On rembobine



Bucarest, 1995

On retrouve des images d'il y a quoi, vingt ans ? et on les regarde comme presqu'étranger à soi-même. Plus rien de ce qu'on y voit n'existe, le dernier écho de ce monde disparu s'est éteint depuis longtemps et l'on s'étonne d'en avoir un jour inscrit des fragments fugitifs sur un peu de gélatine. On repense alors à ces journées d'entre-deux que l'on avait oubliées et, petit à petit, reviennent à notre mémoire les éléments, diffus comme des signaux de fumée, d'un puzzle qui se reconstitue. Ce sont les chiens errant au cœur de la ville qui s'invitent, la gare et ses gamins perdus, les maisons jadis cossues qui s'effilochent, les Dacia garées à la hussarde et empaquetées pour l'hiver, les mignonnettes d'alcool qui cogne en vente dans les kiosques sur la rue, les anciens locaux de la police politique reconvertis en chambres d'hôtes pour l'Université, Patricia Kaas en boucle, en play-back et en karaoke dans les restaurants clinquants, les boutiques revêches au choix encore spartiate, les Mercedes et la poussière, les cités moroses entre flaques et barres de béton, les essuie-glaces qui disparaissent si on les laisse sur le pare-brise, le sourire sérieux de N. — sa frange et son regard de myope —, le Français désuet mais parfait du Professeur B., l'Opéra abandonné que l'on visite en contrebande, le Musée désert où chaque pas résonne, les librairies et les étals de bouquinistes un peu partout, les blousons étroits, le premier McDo au coin du dernier cinéma stalinien. Il y a, à se re-projeter dans ce temps-là, quelque chose d'ambigu, rien qui laisserait dire que c'était "bien" mais en même temps la nostalgie égoïste d'y retrouver sa presque jeunesse. 

lundi 11 novembre 2013

Phone home

Vol BA635 Lyon-Londres,
7 novembre 2013

New York (New York), août 1981. Premier voyage aux États-Unis. À peine arrivé à l'aéroport, il me faut confirmer un rendez-vous par téléphone et, si je n'ai pas de difficulté à repérer un peu partout les alignements des appareils publics — ces gros blocs de métal que l'on a appris à connaître par les films —, il me faut juste me munir auparavant de suffisamment de quarters pour la communication, patienter ensuite en entendant le grésillement caractéristique de la sonnerie à l'autre bout — avec une pensée pour Hitchcock et "Le crime était presque parfait"... —, et surtout passer l'épreuve de la conversation, en anglo-américain et dans le bruit touffu de l'aérogare. Après avoir raccroché, j'espère avoir tout bien compris du lieu, du jour et de l'heure...

Massachusetts, août 1981. Comme pour la plupart de mes déplacements de ces années-là, c'est sans réservation que j'ai débarqué à New York. Après quelques nuits en YMCA, le plus simple pour me rendre à Woods Hole où j'ai rendez-vous est de prendre un bus Greyhound mais il y a des grèves, des manifestations avec des pancartes "Stop Reagan's war on the poor", des occupations de gares routières, et je me retrouve en rade dans un motel surplombant une autoroute. J'appelle chez mes parents et c'est ma mère qui me répond. Je lui parle en regardant dans le vague à travers la fenêtre, notre conversation épisodiquement couverte par le trafic des voitures en contrebas.

Tampa (Floride), octobre 1983 (pourquoi pas ?). C'est d'abord à la chaîne que j'introduis les pièces dans la fente du taxiphone, puis je les glisse ensuite une à une, rappelé régulièrement à l'ordre par un message avertissant de la coupure imminente. Comme souvent, la monnaie vient à manquer, et je gaspille alors les derniers instants à ne rien dire d'autre que "Je n'ai plus de pièces..." ou "Il n'y en a plus pour longtemps...". D'autre fois, je jouerai la prévoyance et j'aurai le temps de transmettre le numéro de la cabine pour me faire rappeler. Je dégusterai alors le plaisir égoïste de laisser sonner plusieurs fois — là, au milieu de la rue, des passants et des klaxons — avant de décrocher.

Pékin (République Populaire de Chine), avril 1986. La chambre de l'Hôtel de l'Amitié est immense, à l'image de ce qu'il a pu être dit de l'amitié sino-soviétique du temps où celle-ci a justifié la construction de celui-là. Sur le bureau, posés à côté d'un pot de fleurs, on peut voir une lampe sur un napperon brodé et un téléphone en bakélite, dodu comme un bouddha. La ligne n'est pas directe, il faut passer par un opérateur. D'abord incrédule, je dois me rendre à l'évidence que la communication s'établit avec facilité et j'appelle la maison avec le sourire un peu bête des enfants gagas de leur nouveau jouet. Tout va encore bien.

Kingston (Rhode Island), juillet 1987. Un bureau de visiteur, c'est toujours un peu la même chose. Une pièce vide avec une ou deux tables vides et des étagères vides... Où que l'on regarde, ce ne sont partout que lignes et angles droits, à l'exception du long fil qui serpente depuis une prise au mur pour se raccrocher à un téléphone gris et solitaire servant surtout d'interphone. Le premier jour, j'attendrai l'appel du rendez-vous pour le déjeuner mais, les habitudes sitôt prises, "mon" téléphone ne sonnera plus guère et, relégué derrière des papiers aux piles peu à peu montantes, j'oublierai jusqu'à sa présence.

San Francisco (Californie), mars 1992. Il fallait en ce temps-là confirmer auprès de la compagnie aérienne son vol retour, par téléphone et au plus tard la veille. Faute de l'avoir fait, c'est à l'aéroport que je découvre que TWA a annulé le San Francisco-New York du jour, avec à la clé un départ re-programmé a priori le lendemain à la même heure, un logement de transit dans un hôtel à quelques kilomètres et la consigne d'y attendre un appel pour d'éventuelles instructions. Peu enclin à connaître l'angoisse des acteurs se morfondant devant un combiné désespérément silencieux en priant que leur agent les appelle (ou des politiques espérant leur entrée au gouvernement), je retourne dès tôt le matin me poster à proximité des guichets d'information.

Californie, juin 1993. Une route droite bordée sur des kilomètres d'un désert à perte de vue, succession de champs de pierres blanches dont le chanfrein en bordure de fossé est décoré ça et là de messages — déclarations d'amour le plus souvent —  écrits avec des galets sombres. Quelque part au milieu de ce nulle part, une cabine téléphonique alimentée par un panneau solaire qui la surplombe. Juste le plaisir de s'arrêter pour dire : "Devine d'où je t'appelle !".

Brasov (Roumanie), mai 1995. La pièce affiche une tristesse presque professionnelle et, même s'il serait bien tard pour appeler, le gros téléphone blanc posé sur la table de chevet entre les deux lits étroits, aux ressorts grinçants, n'offre de toutes façons aucune tonalité. Peut-être après tout n'est-il que décoratif, ou ses heures de fonctionnement sont-elles calquées sur celles du gardien qu'il a fallu réveiller pour prendre possession de la chambre pourtant dûment réservée (par téléphone...) ?

Trieste (Italie), septembre 1996. Les téléphones publics n'acceptent plus de monnaie mais seulement des cartes, cartes de crédit que l'on doit faire passer à la bonne vitesse et dans le bon sens dans une glissière verticale, ou cartes pré-payées achetées dans un kiosque. Il me reste une de celles-ci d'un précédent voyage et, l'introduisant dans l'appareil qui l'accepte, j'ai l'impression prétentieuse d'une familiarité me distinguant du touriste ordinaire, presque d'un retour au pays.

Mexico (Mexique), novembre 1996. La rue est bruyante, mais la coque en plastique transparent qui protège le téléphone public offre un semblant d'isolation. Finis les PCV ou la course à la petite monnaie, je suis devenu un pro de la "Carte Pastel Internationale" dont je connais le code (à une douzaine de chiffres) par cœur, ce code que je compose machinalement du pouce droit en appuyant, sans attendre les instructions, sur les touches métalliques à la surface légèrement incurvée.  C'est mon père que j'ai en ligne. Il a toujours mal au dos et je me fâche presque avec lui pour les examens qu'il se refuse à faire. Je me sens mal à l'aise en raccrochant.

Orlando (Floride), avril 2001. Mauvaise correspondance, arrivée tardive et pas de valise sur le carrousel — on m'assure qu'elle a pris le vol suivant et me sera livrée à l'hôtel. Couché à minuit passé, je suis réveillé à trois heures du matin par un coup de fil de la réception qui n'a pas le droit de garder l'objet et doit impérativement me le remettre en mains propres, sur l'instant. Récupération ronchonne au lobby et, décalage horaire aidant, trop tard pour espérer se rendormir.

Bangalore (Inde), janvier 2002. Coutumier du fait, Benoît M. n'est pas venu donner sa conférence mais il a envoyé une cassette video à projeter, tout en tenant à répondre par téléphone aux questions de l'assistance depuis la chambre de son hôtel en Californie. L'appareil est rouge vif, il trône sur une table à nappe verte posée au milieu de l'estrade et, sitôt la projection terminée, le président de séance compose cérémonieusement le numéro fatidique, les haut-parleurs saturant l'espace d'une sonnerie grêle qui s'éternise. "Professor M.? Do you hear me, Professor M.?"

Madison (Wisconsin), août 2007. En arrivant à l'hôtel, le réflexe n'est plus de s'enquérir de la procédure pour téléphoner ("0" pour sortir, combien la minute, etc.), mais de savoir s'il y a du wifi, quel réseau et quel mot de passe. La liaison est bonne, j'ouvre une session skype et je fais visiter ma chambre par webcam à celles de la famille qui sont à Lyon ce jour-là. Je marche l'ordinateur à bout de bras, faisant se succéder des images à donner le mal de mer du lit, de la salle de bain et de la vue depuis la fenêtre.

Londres (Grande-Bretagne), novembre 2013. Atterrissage à 7h26, SMS "Bien arrivé" envoyé/reçu à 7h27.

Shanghai (Chine), décembre 2006

dimanche 9 juin 2013

La vie des livres (19)

Bucarest (Roumanie), août 2012

mardi 4 juin 2013

Cafés (49)

Hanu' Berarilor,
Bucarest (Roumanie), août 2012

lundi 3 juin 2013

Avant le coup de feu

Bucarest (Roumanie), août 2012

jeudi 25 avril 2013

Passerelles (68)

 Parana (Argentine), novembre 2012

New York (New York), mars 1996

Bucarest (Roumanie), août 2012

vendredi 22 février 2013

Cinéma, Cinémas (32)

Corso,
Bucarest (Roumanie), 1er septembre 2012

mardi 19 février 2013

Cinéma, Cinémas (31)

Patria,
Bucarest (Roumanie), 1997/2012

vendredi 21 septembre 2012

Biserica Sf. Nicolae

Bucarest, 1er septembre 2012

dimanche 9 septembre 2012

Photos que l'on aurait pu prendre (23)

Mai 1995, une petite ville dont j'ai oublié le nom, quelque part entre Bucarest et Brasov. Les trottoirs de l'avenue centrale, naguère défoncés, commençaient à être remis en forme, mais les bâtiments qui la longeaient hésitaient encore entre la décrépitude d'avant la démolition et le clinquant du neuf. Parmi eux, un cinéma à l'abandon avait attiré mon regard et je m'apprêtais à le photographier — comme j'ai pu le faire de tant d'autres cinémas un peu partout — lorsque le Professeur B., qui m'accompagnait dans cette excursion qu'il avait programmée à mon intention, manifesta une surprise sous laquelle, malgré le raffinement un peu suranné de ses manières, il était facile de percevoir une touche de contrariété, voire d'agacement. À quoi bon photographier cette chose sans charme que personne ici ne regrettera ? N'y a-t-il pas mieux à rapporter comme image de ce pays qu'un cube de béton au crépi écaillé ? Et peut-être valait-il mieux en effet que cette photo ne soit pas prise, ou alors pas comme ça, juste en passant…

samedi 8 septembre 2012

Passerelles (63)

 Bucarest, mai 1995

Bucarest, 1er septembre 2012

vendredi 7 septembre 2012

Downtown Bucharest (3)

Bucarest, 1er septembre 2012

jeudi 6 septembre 2012

Downtown Bucharest (2)

Bucarest, 1er septembre 2012

mercredi 5 septembre 2012

En marchant

Bucarest, 28 août 2012

lundi 3 septembre 2012

Nocturne (5)



Bucarest, 30 août 2012

dimanche 2 septembre 2012

Apparat

Circul Militar,
Bucarest, 1er septembre 2012

samedi 1 septembre 2012

Temps vertical

Bucarest,
1er septembre 2012

Dans le centre du centre, c'est comme si l'espace était horizontal et le temps vertical.
Sans lever le nez, l'horizon rapproché n'offre que succession de bars, de restaurants et de terrasses. mais que le regard monte pour se porter au-delà des parasols Heineken ou Ursus, et c'est une autre histoire, un mélange de corniches en péril, d'encadrements de fenêtres ouverts sur le ciel, d'enseignes orphelines et en bataille, de vestiges disparates et stratifiés d'autres temps.
Et la foule jeune elle-même, qui va et vient dans ces rues en rangs serrés, ressemble à celle que l'on pourrait croiser à Vienne, Prague ou Rome, vêtue des mêmes marques et sûre de la même beauté, alors qu'en montant dans les étages du grand magasin d'habillement situé à deux pas, c'est là encore à un voyage dans le temps que l'on est conviés, au milieu d'articles innombrables et désuets semblant rescapés de l'époque des magasins d'État.


De tous ces immeubles partiellement à l'abandon — et ils sont légion —, nombre de ceux visibles de loin sont couverts de gigantesques toiles publicitaires tendues sur une hauteur de plusieurs étages, façon d'en cacher la misère tout en en tirant profit… Les autres ont parfois l'austérité fonctionnelle et planifiée de leurs façades géométriques, parfois la signature du patchwork pragmatique de leurs aménagements successifs, toujours l'indifférence aux tables rases d'en bas.




intens (2)

Bucarest, 1er septembre 2012

De mardi à vendredi, on aura fait plus de quatre fois l'aller-retour entre l'hôtel et le site du congrès, variant si peu le trajet que celui-ci en est presque devenu une routine, avec le corollaire que l'attention des premières fois s'est peu à peu dissipée. Et puis, le samedi venu, on y revient sans raison et, par ce changement que l'on pourrait croire sans importance, on s'aperçoit que rien n'est plus tout à fait pareil. On remarque ce qui en était venu à nous échapper et on se surprend à ressentir quelque chose qui ressemble à ce petit pincement que l'on pouvait avoir, enfant, en repassant à côté de l'école désertée, quelques jours après la fin des cours.

Passerelles (62)

Hotel Rembrandt,
Bucarest, 31 août 2012

Hanu Berarilor,
Bucarest, 1er septembre 2012